Lifestyle

Sober summer : un été pas si sobre

juin 18, 2025
par Elise Coppens

Chaque année, une nouvelle version de l’Aperol Spritz tente de détrôner le cocktail de l’été précédent. Si celui de cet été est sans alcool, cela ne nous surprendra pas. Kombucha, mocktails, bulles sans alcool ou bières sans alcool : tous gagnent du terrain dans la course au statut de boisson estivale favorite. Mais pourquoi trouve-t-on soudain qu’un sober summer n’est plus si sobre ? 

AIl y a à peine cinq ans, si vous ne vouliez pas boire d’alcool en terrasse, vous aviez probablement le choix entre de l’eau ou un soda. Même au restaurant, les mocktails et boissons sans alcool restaient l’exception. Une évolution que Boqion De Pooter, propriétaire du café et lunch végétal Camion et du restaurant gastronomique associé Camionette à Anvers, a pu observer de près. « Quand nous avons lancé notre établissement en 2019, le kombucha, les boissons sans alcool et leur palette de saveurs étaient encore perçus comme étranges. Nous faisions surtout des cocktails maison et il était difficile de trouver des options adaptées à cette demande. » 

Les quelques options disponibles à l’époque étaient souvent très sucrées. « Lors d’un afterwork avec des amies, je cherchais une boisson sans alcool et je n’ai reçu qu’un breuvage très sucré », explique Charlotte Matthys, fondatrice de NONA Drinks. « C’est pourquoi j’ai commencé à expérimenter moi-même des herbes et des saveurs plus équilibrées, et j’ai lancé en 2018 mon propre gin sans alcool, NONA June. Pour obtenir une boisson pure et équilibrée, j’ai testé différentes herbes, en demandant beaucoup de retours à des chefs étoilés, sommeliers, connaisseurs en gin et cocktails. Très vite, notre boisson a trouvé sa place sur la carte d’établissements de renom comme Boury. » 

Une offre de luxe 

Il y a sept ans, personne n’aurait cru que l’offre exploserait si vite. « Dans notre restaurant Camionette, nous avons aujourd’hui la chance de collaborer avec des partenaires fixes comme Figa Kombucha, une brasserie anversoise, ou Purjus de Brandstof à Mortsel. Nous avons toujours du kombucha de Figa à la carte, et nous avons même co-créé une version spéciale. Purjus est très en avance sur le marché sans alcool, avec une large gamme de boissons venues de Norvège et du Danemark, des pays bien plus développés que nous dans ce domaine. C’est cela qui rend tout cela ‘nouveau’ pour nos clients. » 

Ces boissons peuvent être commandées à la carte en terrasse, mais pour les accords mets-boissons sans alcool, ils misent encore sur des créations maison. « Nous les réalisons à base de restes de cuisine et d’ingrédients présents dans notre menu, afin de renforcer les saveurs. Par exemple, on peut réutiliser la pulpe de tomate. Avec des thés et sirops, on fabrique des jus de fruits et légumes qui accompagnent le menu. Ce ne sont pas des boissons à commander à part, elles sont pensées pour enrichir l’expérience culinaire. C’est plus qu’un simple mocktail. » 

« Ce n’est plus étrange de ne pas boire pendant un ou trois mois. Le plus beau, c’est qu’on n’a plus à sacrifier sa vie sociale pour ça. »

— Charlotte Matthys. Fondatrice de NONA Drinks

Une expérience complète 

Il y a une plus grande demande parce qu’il y a une plus grande offre, mais cette offre répond aussi à une demande croissante du public. « On remarque que les gens sont souvent ouverts à ces alternatives quand ils les goûtent », observe Charlotte. « Lors de nos dégustations, au début, certains n’étaient pas convaincus par le gin sans alcool, souvent parce qu’ils n’aimaient pas le gin classique non plus. On leur demandait alors : Et qu’est-ce que vous aimez, vous ? C’est ainsi que nous avons créé les alternatives Spritz et Ginger, pour répondre à d’autres préférences. Cela permet de toucher un public plus large et d’élargir naturellement l’offre. » 

Qu’on mélange un gin sans alcool avec du tonic ou qu’on fasse un Aperol Spritz sans alcool, c’est surtout le sentiment que procure la boisson qui reste. « Il s’agit d’une expérience globale », poursuit Charlotte. « Personne ne veut s’asseoir en terrasse et n’avoir que de l’eau s’il ne veut pas boire d’alcool. On veut trinquer avec ses amis, avec un vrai verre à la main, mais ce verre n’a plus besoin de contenir de l’alcool. Avant, on n’avait tout simplement pas le choix. » Un constat que partage Boqion : « Si les alternatives n’étaient pas aussi savoureuses, le sans alcool serait encore moins attrayant. Aujourd’hui, on peut créer des accords entièrement sans alcool qui sont délicieux, ce qui facilite la décision pour le client. » 

Et il ne s’agit pas d’un choix exclusif. « Beaucoup de clients chez Camionette choisissent l’accord mets-vins alcoolisé, mais optent pour une boisson sans alcool à l’apéritif. Le public réfléchit davantage. Ce n’est plus forcément tout alcool », note Boqion. La santé joue un rôle important dans ce changement de mentalité. Manger plus sainement compte, mais on commence aussi à prendre conscience de l’impact de l’alcool sur le corps. « Ce n’est plus étrange de ne pas boire pendant un ou trois mois, parce qu’on prépare un marathon, ou simplement pour voir comment on se sent. Le plus beau, c’est qu’on n’a plus à sacrifier sa vie sociale pour ça », conclut Charlotte. 

Un palais plus naturel 

Ce sont surtout les moins de 30 ans qui recherchent activement des alternatives, mais les choses évoluent aussi chez les plus âgés.
« Un 50+ alternera peut-être une NONA avec un verre de vin plus tard dans la soirée, mais ils sont bien plus ouverts qu’il y a sept ans », affirme Charlotte. Chez Camionette, Boqion constate aussi une évolution chez les 40+. « À partir de cet âge, on voit beaucoup de couples faire un choix 50/50. Ils prennent à la fois l’accord avec vin et celui sans alcool, qu’ils partagent. Cela leur permet de tout goûter. La majorité des gens est ouverte à cette approche, peu importe l’âge. C’est une belle évolution à observer. On sent un retour vers des saveurs plus naturelles, avec davantage d’audace dans les combinaisons gustatives. » 

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