La puissance des données, l’indispensabilité de la vie privée
Les données et l’IA sont aujourd’hui des facteurs essentiels pour le bon fonctionnement des organisations et des entreprises. Optimiser les activités, étayer les décisions commerciales, accélérer et pérenniser la croissance à long terme… La gestion des données est indispensable. Mais qu’en est-il de la vie privée ?
La collecte, l’analyse et l’exploitation des données : pour la plupart des entreprises, c’est le quotidien. « Il y a de plus en plus de défis industriels et sociétaux qui ne peuvent être abordés que si les données collaborent », explique Philippe Haenebalcke, co-fondateur et CCO de Datavillage. « Plus vous pouvez faire collaborer les données plutôt que de les laisser en silos, plus vous obtiendrez de meilleurs services et produits. À condition de pouvoir offrir des garanties sur la sécurité, la confidentialité et la vie privée. »
Cette vie privée devient de plus en plus importante, surtout parce que le risque d’abus est toujours latent, comme cela a été le cas lorsque l’on a découvert qu’Adobe restait vague sur l’utilisation qu’elle ferait de son contenu utilisateur pour former ses algorithmes. « Adobe est souvent utilisé pour des contrats ou des documents confidentiels », précise Jents Debruyne. Son cabinet d’avocats, spécialisé en IT et en vie privée, travaille principalement pour de grandes entreprises et des fournisseurs de logiciels. « Le problème était surtout que les conditions générales d’Adobe étaient si vagues qu’il semblait que le contenu confidentiel des gouvernements et des entreprises pouvait être utilisé pour l’IA générative, qui absorbe les données au point de perdre tout contrôle dessus. »
La législation GDPR est donc plus que jamais nécessaire. « Elle assure une certaine hygiène dans le traitement des données des entreprises », poursuit Debruyne. « Un exercice continu, car les flux de données sont également continus. Et cela doit être fait de manière rigoureuse, car le risque de cybercriminalité est devenu très élevé : certaines données peuvent causer des dommages considérables aux personnes malveillantes. De plus, les grandes entreprises de technologie ne doivent pas utiliser nos données pour n’importe quel objectif. »
« Je suis convaincue qu’il est possible d’innover de manière appropriée sans violer la vie privée de l’individu. »
Trop strict ?
D’un point de vue positif, la transparence autour du traitement des données peut même être utilisée comme une sorte de branding. « Surtout dans un environnement B2C, il est important de montrer que vous n’avez pas d’autres intentions avec les données des clients que ce qui est précisé dans les critères », confirme Debruyne. « Mais dans le marché B2B aussi, cela devient de plus en plus important : si vous souhaitez vendre votre entreprise, vous devez pouvoir prouver que vous traitez vos données de manière appropriée. Car cela ressortira certainement lors de la due diligence des fournisseurs de logiciels. »
Nous souhaitons savoir si la protection des données peut parfois être trop stricte. Par exemple, dans le secteur de la santé, des solutions IT et des applications innovantes sont développées aujourd’hui, mais elles se heurtent souvent à une protection très rigide des données des patients. « Il faut rechercher un équilibre », explique Debruyne. « Entre les droits de l’individu d’une part et la nécessité d’innovation d’autre part. Je suis cependant convaincue qu’il est possible d’innover de manière appropriée sans violer la vie privée. Cela demande parfois un effort de la part du créateur de logiciels ou des développeurs, mais cela en vaut la peine. Cela pourrait ralentir le processus, mais à long terme, vous prendrez la bonne direction. Car qui voudra faire confiance à un hôpital où votre dossier est exposé à tous ceux qui entrent ? »
« Vous pouvez en effet utiliser ces données », confirme Haenebalcke. « Nous nous dirigeons plus que jamais vers une collaboration autour des données, j’en suis vraiment convaincu. Mais pas de la manière dont cela se faisait auparavant. »
Citoyen et consommateur
« Le GDPR n’est pas une punition, car il ne bloque pas le flux de données en soi », conclut Debruyne. « Le GDPR permet justement d’avoir une base juridique pour pouvoir traiter les données. »
« Le GDPR n’a effectivement pas pour but que les entreprises cessent d’utiliser les données », ajoute Haenebalcke. « Au contraire, l’Europe veut justement encourager l’utilisation des données, mais de manière correcte et avec respect pour le citoyen et le consommateur. Différentes technologies améliorant la confidentialité rendent cela de plus en plus possible. Nous avons le GDPR ici, mais aussi, par exemple, la Data Governance Act, qui décrit comment traiter correctement les collaborations de données. C’est parfois quelque chose que nous perdons de vue. »