Comment gérer un mélange coloré sur le lieu de travail ?
Notre société devient de plus en plus diversifiée, et la même tendance commence à se refléter dans notre milieu de travail. Ce changement est positif, car un environnement de travail diversifié favorise la créativité et l’innovation, selon les études. Cependant, il peut également entraîner des différences, ainsi que des préjugés ou des malentendus. Alors, comment coopérer efficacement ?
Nos lieux de travail sont aujourd’hui plus diversifiés qu’avant. Ceci est en partie dû à l’augmentation de l’âge de la retraite, au nombre croissant de femmes dans le monde du travail, mais aussi au fait que dans nos grandes villes, un jeune sur trois a des origines diverses. « Dans un monde idéal, cette diversité se refléterait naturellement dans nos entreprises. Des personnes de tous âges, genres, orientations sexuelles, origines ethniques, cultures et niveaux d’éducation devraient pouvoir y collaborer parfaitement», explique Khadija Rejdy, CEO d’UPOP, une organisation qui aide les entreprises à créer un environnement de travail inclusif.
Cette diversité est également un atout pour les affaires, selon Khadija Rejdy: « Elle crée une diversité d’opinions et d’idées, conduisant à plus de créativité et d’innovation, comme le montre une étude de Boston Consulting Group en 2017. Collaborer avec des collègues d’origines différentes. renforce non seulement votre équipe, mais aussi l’entreprise elle-même. L’étude ‘Diversity Wins’ de McKinsey montre d’ailleurs que les entreprises plus diversifiées sont plus rentables. »
Soyez un extraterrestre
Un mélange varié présente certes des avantages, mais cela ne signifie pas qu’il est exempt de défis. « Bien sûr, il est plus facile de se réunir avec des personnes qui pensent et agissent de la même façon», déclare Hanan Challouki, fondatrice de l’agence stratégique Inclusified. « Quand chacun a une idée ou une opinion différente, il faut dialoguer davantage pour parvenir à un consensus. »
En tant qu’experte en diversité, Hanan Challouki observe souvent que les différences sont parfois difficiles à accepter. « Ce n’est pas une question de mauvaise volonté, mais plutôt d’ignorance. Par exemple, quand je regarde les versions américaines ou australiennes de l’émission Mariés au premier regard, je suis souvent surprise : comment cette femme peut-elle trouver ça important, ou pourquoi cet homme pense-t-il ainsi ? C’est parce que je regarde avec ma ‘vision belge’. La même chose peut arriver sur le lieu de travail. Nous partons de notre propre cadre de référence. C’est peut-être un peu narcissique, mais c’est très humain. L’important est de comprendre que tout le monde ne pense pas ou n’agit pas de la même manière, et que c’est tout à fait acceptable. »
« L'important est de comprendre que tout le monde ne pense pas ou n'agit pas de la même manière, et que c'est tout à fait acceptable. »
« Nous pensons encore trop souvent : réunissons cette mixité au travail et tout ira bien. », explique Khadija Redjy. « Hélas, ce n’est pas si simple. Nous vivons dans un monde diversifié, mais nous restons souvent sur nos propres ‘îles’, alors qu’apprendre à se connaître nécessite de la pratique. Un conseil que je donne souvent est ‘agissez comme un extraterrestre’. Remettez tout en question, y compris ce que vous faites. Pourquoi faites-vous cela? Pourquoi est-ce important? Comment les autres le perçoivent-ils? Discutez avec des collègues qui ont une vie différente de la vôtre ou faites ensemble une activité hors de votre zone de confort. »
Hanan Challouki compare cela au début d’une relation : « Vous voulez tout savoir de l’autre. Une relation de travail harmonieuse commence également par un intérêt sincère envers l’autre. Au début, cela demande beaucoup d’énergie, mais cela en vaut la peine. Il ne faut pas avoir peur de communiquer ouvertement et honnêtement. Parfois, une remarque involontairement blessante, comme ‘Vous parlez bien le français’ ou ‘D’où venez-vous vraiment ?’ peut surgir. Même les meilleures intentions peuvent mal tourner, mais si vous êtes bien intentionné et ouvert aux retours, vous pouvez en tirer des leçons. »
De la base au sommet
« Les entreprises affirment souvent que la diversité est l’une de leurs valeurs fondamentales. Mais est-ce vraiment le ressenti de tout le monde ? La moitié des employés peuvent être des femmes, mais si elles n’ont pas le même salaire ou les mêmes droits de décision, il n’y a pas de vraie diversité », souligne Hanan Challouki. « C’est pourquoi je parle non seulement de diversité mais aussi d’inclusivité. Là où la diversité concerne la composition de l’effectif, l’inclusivité concerne la création d’un environnement où chaque personne se sent respectée, valorisée et traitée équitablement. »
Khadija Rejdy souligne donc l’importance d’un lieu de travail inclusif où chacun peut être soi-même. « Les personnes qui se sentent exclues ou incomprises pour une raison ou une autre dans une entreprise sont moins engagées, moins performantes et ont tendance à partir plus tôt, rendant la diversité de recrutement inutile. Idéalement, la politique d’inclusion devrait être appliquée de la base jusqu’au sommet. Toutefois, cela est plus facile à dire qu’à faire, car il existe des biais dans les processus de sélection: nous avons tendance à choisir des personnes qui nous ressemblent. Puisqu’il y a moins de diversité au sommet aujourd’hui, il est encore plus difficile pour ceux qui sont différents de franchir cette barrière. Un manager prêt à soutenir un tel candidat peut cependant faire la différence. »
Il n’existe pas de solution unique pour créer un lieu de travail inclusif et diversifié qui fonctionne harmonieusement, selon Khadija Rejdy : « Une campagne de recrutement percutante ou l’organisation d’un iftar au travail, c’est sympa, mais cela ne constitue pas une politique durable. Nous avons encore trop souvent une approche symptomatique, alors qu’il faudrait d’abord travailler dur en interne pour créer une culture d’entreprise qui transcende toutes les différences et qui rassemble. Le reste suivra. »