Comment aligner la culture d’entreprise d’une société rachetée sur la vôtre ?
L’acquisition d’une autre entreprise peut sembler une affaire de rêve sur papier : deux modèles commerciaux qui correspondent, l’acquéreur s’ouvre de nouvelles opportunités de marché, une gamme de produits élargie… Mais si les cultures d’entreprise des deux parties ne sont pas en harmonie, le projet pourrait être voué à l’échec. Comment s’assurer que les deux cultures d’entreprise vont s’harmoniser ? Comment fusionner deux cultures d’entreprise lors d’une acquisition ?
La bonne nouvelle, c’est que lors d’une acquisition, les cultures d’entreprise existantes (qu’il y en ait 2 ou plus) peuvent se renforcer et s’enrichir mutuellement, tout comme « 1+1 » peut parfois faire plus que 2. La mauvaise nouvelle, car il y en a une, est que si vous accordez trop peu d’attention à la culture d’entreprise de la société acquise ou fusionnée, l’opération peut également échouer radicalement… Même si, sur le papier, tout semblait mener à un partenariat de rêve. Car comme le dit le célèbre adage : « la culture mange la stratégie au petit-déjeuner ».
Dans les deux cas – positif ou négatif – il est donc essentiel de prêter suffisamment d’attention à la culture d’entreprise et de veiller à la possibilité d’établir une synergie. Mais comment faire ?
Vous avez dit culture d’entreprise ?
Une entreprise, c’est bien sûr ses biens et sa flotte, ses produits et ses services, ses processus et ses machines. Ce qui signifie que lors d’une acquisition ou d’une fusion, il est nécessaire de tout analyser sur le plan financier, juridique et fiscal.
Mais au-delà de tout ça, une entreprise, c’est avant tout son personnel. Et ces personnes sont habituées à travailler dans une certaine culture et atmosphère, sur la base d’accords déclarés ou tacites (par exemple, sur les heures supplémentaires), en respectant certaines conditions de travail, certains modes de communication, en bénéficiant de certaines stratégies commerciales, de relations d’équipe, etc. En ce sens, la culture d’entreprise peut être décrite de manière assez générale comme la manière de faire les choses.
Et cette culture d’entreprise peut être complètement différente d’une entreprise à l’autre. Il est donc essentiel d’en tenir compte lors d’une fusion ou d’une acquisition afin que ces cultures puissent s’harmoniser et ne pas se repousser comme l’eau et l’huile, ou comme deux groupes sanguins ne devant en aucun cas être mélangés si l’on veut rester en bonne santé. En tant que chef d’entreprise, vous ne devez donc jamais supposer que les cultures d’entreprise s’harmoniseront automatiquement avec le temps, en partant du simple postulat que les PDG des deux entreprises concernées s’entendent bien.
L’harmonisation nécessite généralement une analyse de ces cultures d’entreprise et éventuellement une réorganisation des RH. S’il s’agit d’une opération nécessaire, comment l’aborder concrètement ?
Analyse
Lors d’une fusion ou d’une acquisition, il y a toujours une chose à faire en priorité : l’analyse de due diligence ou diligence raisonnable. Il s’agit de passer au peigne fin l’entreprise cible afin de l’évaluer sur les plans économique, fiscal, financier et juridique : l’entreprise a-t-elle déjà été impliquée dans une fraude fiscale ou un autre délit ? Quelle est la solidité de la structure de l’entreprise ? Quels sont les chiffres d’affaires et les prévisions, etc. La diligence raisonnable est un processus très concret qui repose sur des chiffres concrets. Les gens pourraient penser qu’elle ne peut pas s’appliquer à la culture d’entreprise, parce qu’elle porterait sur quelque chose d’intangible. Mais c’est faux : la culture d’entreprise se compose en réalité de multiples paramètres. L’acquéreur serait donc bien avisé d’effectuer (ou de faire effectuer) des recherches sur la culture d’entreprise en plus de la due diligence – une due diligence culturelle basée sur des paramètres tels que la composition des équipes, les offres d’éducation et de formation, les avantages sociaux, la constitution des équipes, certains accords, le style de leadership, etc. Des enquêtes peuvent alors être utilisées pour évaluer la satisfaction des employés. En tout état de cause, cette connaissance préalable est essentielle pour passer aux étapes suivantes : après tout, la culture d’une entreprise est unique, imbriquée dans l’ADN de l’organisation, alors qu’une analyse de rentabilité ou une stratégie l’est dans une bien moindre mesure. Voire même pas du tout.
Communication
Outre ces connaissances préalables, indispensables pour aller de l’avant, la communication est la deuxième clé. Les employés de l’entreprise acquéreuse et de l’entreprise acquise doivent comprendre pourquoi l’acquisition est nécessaire. Après tout, cette acquisition implique des changements, et personne n’aime vraiment ça. Si certaines personnes se sentent tenues à l’écart de ce processus, vous ne ferez naître que leur ressentiment.
Les chefs d’entreprise ne doivent donc pas partir du principe que l’argumentaire attrayant de l’entreprise à acquérir suffira à convaincre leurs propres employés. Non, ils doivent engager le dialogue, répondre aux questions qui se posent indubitablement et apaiser ainsi les éventuelles inquiétudes en apportant de la clarté et en permettant d’étouffer immédiatement les rumeurs dans l’œuf. Et pour les entreprises rachetées, cette nécessité de bien communiquer est d’ailleurs encore plus importante : des études montrent que jusqu’à quatre salariés sur cinq sont généralement opposés au rachat, en raison même de ce changement et de la peur de la restructuration.
Cette communication, d’ailleurs, ne doit pas nécessairement présenter un festival de bonnes nouvelles, pour autant qu’elle soit claire et concrète. L’engagement des employés – et cela s’applique à tous les processus de l’organisation – est la condition préalable la plus importante pour assurer leur satisfaction.
Suivi
La culture d’une entreprise n’est jamais un fait accompli et la gestion du changement n’est jamais une tâche achevée : le monde change à la vitesse de l’éclair, il est donc nécessaire d’y adapter en permanence la culture de l’entreprise. Les gens changent aussi, il faut donc continuer à travailler sur les moments d’évaluation et de feed-back, et créer un espace où chacun sent qu’il est libre de donner un retour d’information. Vous misez ainsi à nouveau sur l’engagement des employés, et cette approche ne peut que porter ses fruits. Si vous utilisez les valeurs de votre entreprise comme fil rouge ou comme fil directeur, la voie à suivre restera claire.
Attention : pas d’assimilation
L’harmonisation des cultures d’entreprise ne signifie pas que l’une d’elles doit obligatoirement se fondre dans l’autre. C’est une possibilité, mais ce n’est pas toujours recommandé. Il faut en effet parfois savoir tirer profit de deux points forts. Supposons, par exemple, qu’une grande entreprise acquière une start-up en vue de créer un produit innovant. La première peut avoir des processus bien définis et une structure d’équipe sur site clairement définie, tandis que la seconde travaille de manière très souple et flexible, en mettant l’accent sur le travail à distance. Vaut-il mieux dans ce cas imposer aux employés de la start-up une culture d’entreprise qu’ils verraient un peu comme un carcan ? Ou préférerez-vous opter pour l’analogie du pétrolier (entreprise) et du hors-bord (start-up) qui naviguent côte à côte et s’entraident en tirant parti de leurs forces respectives ?
Conclusion
L’acquisition d’une entreprise n’est jamais une simple opération commerciale : elle porte toujours sur l’adoption d’une culture. Et si elle ne correspond pas à la culture de votre propre entreprise, elle fera des ravages quoi qu’il arrive et, qui sait, pourrait même conduire à un échec à long terme. Raison de plus pour tirer parti de cette harmonisation, et ce dès le premier jour.